Plusieurs milliers d'années avant notre ère, l'homme avait compris le rythme des années, des saisons, de la lune, l'alternance des jours et des nuits. Partout, il attribuait aux Dieux cette régularité cyclique. C'est peut-être pour essayer de s'affranchir de leur toute-puissance qu'il a essayé de domestiquer le temps en le dominant.
Les premières positions de constructions architecturales, un dolmen ou un menhir en Bretagne (France), un obélisque en Egypte, reposent sur des considérations diverses : tombes, marques de lieux religieux, repères pour voyageurs, repères astronomiques... Dans ce dernier cas, l'ombre du soleil ou de la lune tombe à un instant donné sur un lieu précis en lien étroit avec la religion.
Chez les Mayas et les Aztèques, à la même époque, les prêtres sont aussi astronomes. On a trouvé, conservés dans la pierre, des calendriers soigneusement enrichis de dessins de divinités, bien plus précis qu'en Europe.
Le gnomon, simple bâton planté verticalement dans le sol, permet facilement, en n'importe quel endroit, d'observer le mouvement de l'ombre du soleil ou de la lune. C'est l'ancêtre du cadran solaire. On le trouve partout : Amérique, Afrique, Bornéo... Mais son utilisation permet surtout d'effectuer des mesures astronomiques.
En effet, au cours de plusieurs missions Apollo, il était nécessaire d'orienter des instruments de mesures (de vent solaire, par exemple) posés sur la surface lunaire. Le gnomon permettait, par la mesure de son ombre comparée à ses propres dimensions, de trouver des angles d'inclinaison. Si l'astronomie, les mathématiques et la calculatrice vous intéressent, de nombreux sites sont consacrés au gnomon.

Les pyramides babyloniennes, aussi appelées "ziggourats", auraient permis d'observer les astres et d'établir un premier calendrier. Aux environs de 1500 avant J.-C., les Egyptiens ont mis au point le gnomon, un simple bâton planté en terre qui permet d'évaluer l'heure en fonction de l'ombre qu'il projette. Le gnomon constitue l'ancêtre du cadran solaire.
L'ancêtre du cadran solaire est le gnomon : l'étude de sa technique, de ses significations et de son art constitue la gnomonique. Les Anciens attribuent son invention à Anaximandre de Milet, vers l'an 600 avant J.C.
Aujourd'hui, on sait que cette invention est beaucoup plus ancienne.
L'extrémité de l'ombre d'un bâton planté verticalement parcourt très régulièrement un arc : on fabrique un instrument formé d'une tige, appelée style, et d'un cadran, horizontal ou vertical, sur lequel sont gravés des traits indiquant l'heure.
La clepsydre est une horloge à eau connue aussi bien des Egyptiens que des Amérindiens ou que des Grecs. Un vase perçé d'un trou laisse couler de l'eau. Des graduations situées à l'intérieur permettent de mesurer des intervalles de temps.
Cette clepsydre a une forme évasée, plus large en haut, car le débit de l'eau est plus grand quand la dénivellation est plus grande. Les graduations sont ici à peu près équidistantes.
Si le cadran solaire donne l'heure pendant le jour, la clepsydre fait la même chose la nuit, et elle mesure en plus des durées plus brèves avec une bonne précision.
Parmi les réalisations les plus connues, citons la clepsydre offerte par le calife de Bagdad à Charlemagne, en 807, mettant en action des automates, et la gigantesque clepsydre réalisée en Chine par Su-Sung pour l'Empereur, vers 1090, de plus de 10 mètres de haut. La clepsydre, sorte d'horloge à eau, est toujours utilisée au Moyen-Age et à la Renaissance, notamment par Galilée pour effectuer ses mesures de vitesse de mobiles. Le sablier date aussi de cette époque.
Les Sabliers - Les Bougies, Les Lampes à Huile |
Pour mesurer le temps, parallèlement au cadran solaire et à la clepsydre, l'homme fait agir à plein son imagination. Si on ne voit pas beaucoup la clepsydre dans un pays où l'eau est rare, elle est remplacée sans problème par le sablier.
Son inconvénient est qu'il faut souvent le retourner pour mesurer des intervalles de temps relativement longs, mais il indique avec une bonne précision la durée d'une tâche à accomplir. Il est aussi un bon complément des deux instruments déjà cités.
Jules César a inventé le calendrier qui porte son nom, le calendrier julien, par l'introduction des années bissextiles. Mais en 1582, le pape Grégoire XIII met au point/invente le calendrier grégorien - ça ne s'invente pas - ; c'est le calendrier que nous utilisons encore aujourd'hui.
Les premières horloges apparaissent au XIIIème siècle, elles n'ont pas forcément un cadran, et ne possèdent qu'une aiguille, celle des heures. Le principe est simple : un poids accroché à une corde enroulée autour d'un axe horizontal entraîne une aiguille dans un mouvement de rotation. La difficulté est de régulariser le mouvement du poids dans un mouvement uniforme.
Si Galilée vers 1600 étudie l'isochronisme des petites oscillations d'un pendule, c'est le physicien Hollandais Huyghens qui met au point en 1657 avec l'horloger Coster la première horloge à balancier, appelée "pendule". Bientôt, un ressort spiral est associé au pendule, la précision s'en trouve tellement bien améliorée que chaque horloger utilise ce mécanisme.
Mais la première montre individuelle vraiment fiable à la seconde près sera la H-1 créée par le charpentier John Harrison en 1785. Et la révolution Française de 1789 voit la prolifération des montres plates de poche... chez les riches,à la suite des travaux d'un horloger Suisse installé en France, Bréguet. On assiste alors à un véritable travail d'art sur chaque modèle, combinant les formes délicates, les gravures sur or et argent, les insertions de pierres précieuses.
En 1707, l'amiral Anglais Sir Cloudsley Shovel, à la tête d'une escadre de 4 navires, se trompe dans son estime et fait naufrage sur les îles Scilly (ou Sorlingues), au Sud-Ouest de l'Angleterre. Les 2000 marins embarqués et leur amiral se noient. Le gouvernement, qui a invité Sir Isaac Newton à réfléchir aussi au problème, offre en 1714 un prix équivalent à 5.000.000 francs actuels à qui trouvera la longitude à undemi-degré près (soit 30 km en moyenne).
C'est un charpentier-horloger Anglais, John Harrison, qui en 1734 construit un énorme chronomètre de marine de 32,5 kg, représenté ci-contre, visible à Greenwich, dont les résultats en mer sont encourageants, pour lequel il reçoit une forte somme d'argent. Et c'est au cours du voyage du Deptford, en 1761, avec son prototype n°4, nettement plus petit, en forme de montre, qu'il remporte le prix. En 1764, avec le n°5, l'erreur angulaire est de 5,2 secondes (soit une distance de 1850 m) sur un voyage de deux mois.
À terre, le Français Pierre Le Roy est considéré comme le père du chronomètre moderne, d'une conception différente de celle de Harrison. Les horloges placées au sommet des églises et des beffrois deviennent des carillons qui rythment la vie sociale jusqu'à la première révolution industrielle. Beaucoup plus près de nous, la montre à quartz a considérablement augmenté la précision de la mesure du temps avec ses cent mille vibrations par seconde. Mais ce n'est rien à côté de la précision fournie par une horloge atomique. L'étalon de mesure du temps est actuellement fourni par l'atome de césium 133.
Lorsque vous frappez sur un verre en cristal, vous entendez un son car il vibre avec une fréquence qui lui est propre. C'est pareil pour le quartz. Et si vers 1920 on choisit le quartz comme oscillateur, c'est à cause des charges électriques qui apparaissent et disparaissent en permanence à sa surface, au rythme des vibrations. C'est l'effet piézo-électrique.
Ces vibrations, par l'intermédiaire d'un circuit électronique, sont à l'origine du déplacement des aiguilles d'une montre. La précision obtenue est dix fois plus grande que celle de la meilleure des montres mécaniques : 1 seconde en 6 ans.
La première horloge à quartz, en 1930, avait l'allure d'un réfrigérateur tourné à l'horizontale.
L'illustration montre un cristal de quartz avant sa taille, qui dépend des dimensions de l'horloge. En 1970, la miniaturisation est telle qu'apparaît la première montre-bracelet à quartz.
Toujours à la recherche de la meilleure précision, pour répondre aux besoins des télécommunications ou de la navigation, les savants poursuivent leurs recherches, et en 1958 ils mettent au point l'horloge atomique, dont la précision est de 1 seconde pour 3000 ans. Le principe est basé sur le fait qu'un atome absorbe ou émet de l'énergie à une fréquence encore plus précise que celle du quartz. L'atome retenu est le césium Cs.
Pour atteindre une précision de l'ordre de la picoseconde dans la mesure du temps, il a fallu redéfinir ce qu'est l'unité de temps conventionnelle : la seconde. Auparavant, la seconde était la 86.400 ème partie du jour.
Aujourd'hui, c'est la durée de 9192631770 périodes de radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133. Quant à l'unité de longueur, le mètre, elle dépend de cette unité de temps : elle est la longueur du trajet parcouru dans le vide par la lumière pendant une durée de 1/299792458 ème de seconde. Ces définitions ont peut-être l'air bien compliquées mais elles font référence à quelque chose de simple : la fréquence. La fréquence, c'est le nombre de vibrations par unité de temps dans un phénomène périodique, qui se répète régulièrement. Les 9192631770 périodes de radiation représentent 9192631770 vibrations pendant une seconde.
On fera remarquer qu'il fallait savoir ce que valait 1 seconde avant de pouvoir la faire correspondre à ces 9192631770 vibrations ! En effet, on est parti de la 86.400 ème partie du jour, et on a remarqué que cela correspondait aux 9192631770 périodes de radiation. L'intérêt de cette nouvelle façon de mesurer la seconde, c'est qu'elle est très stable, beaucoup plus stable que ce qu'indiquaient les horloges jusque là.
Mais le point essentiel de ce chapitre est la notion de "temps de Planck", soit une limite absolue dans la possibilité de diviser le temps. Résultat d'une formule dans laquelle interviennent les trois constantes fondamentales de la physique, G, h et c, le temps de Planck signifie que l'on ne peut diviser le temps au-delà de 10-43s.
Les Horloges à Atomes Froids |
C'est une des prédictions les plus nouvelles de la relativité générale : le temps passe plus vite au sommet de la Tour Eiffel qu'à sa base. Si cet "effet Einstein" peut bien en principe être détecté entre le haut et le bas de la Tour Eiffel avec une horloge d'une précision extrême, il devient très sensible dès que l'on s'aventure dans l'espace. À tel point que les systèmes de positionnement par satellite, tel le GPS ou le futur système européen Galileo, sont obligés d'en tenir compte pour vous donner votre position avec précision. À bord des satellites en orbite circulaire à quelque 20.000 km d'altitude, les horloges atomiques avancent en effet de 40 microsecondes chaque jour par rapport à leurs consœurs restées sur Terre.
Si cet effet n'était pas pris en compte, il se traduirait en erreur sur les positions de l'ordre de la distance parcourue par la lumière pendant 40 microsecondes, soit une dizaine de kilomètres. Bien sûr, cet effet est corrigé grâce aux équations de la relativité générale, ce qui permet au système de fournir une précision de l'ordre de quelques mètres. Les horloges beaucoup plus précises développées aujourd'hui par les physiciens et métrologistes permettront de faire encore mieux que le GPS. Les équations de la relativité générale seront-elles toujours suffisantes ? C'est tout l'enjeu de la mission Pharao, qui doit rejoindre la station spatiale internationale après 2011.
"L'idée, explique Serge Reynaud, c'est d'utiliser les horloges à atomes froids qui ont provoqué une révolution dans le domaine de la mesure du temps, grâce aux méthodes de refroidissement et de manipulation d'atomes. Ce sont aujourd'hui les meilleures horloges atomiques sur Terre et l'environnement de microgravité permettra d'augmenter encore leur précision".
La Mesure du Temps a encore gagné en Précision |
Une équipe de physiciens du Nist (National lnstitute of Standards and Technology), dans le Colorado, vient de trouver le moyen d'augmenter de 50 % la précision de son horloge atomique au strontium, développée en 2008.
Le principe d'une telle horloge est d'utiliser des atomes de strontium pour vérifier la précision de la fréquence d'un laser. Car ces atomes changent d'état sous l'action d'un laser réglé sur une fréquence élevée très précise, fréquence à partir de laquelle peut être définie la seconde. En mesurant très finement l'effet de petites collisions incontrôlables entre les 2000 atomes de leur dispositif, les chercheurs sont parvenus à limiter son imprécision. L'horloge ne devrait plus gagner ou perdre qu'une seconde tous les 300 millions d'années !
C.B. - SCIENCE & VIE > Juin > 2009 |
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