Mésozoïque de 4,25 à 4,435 Ga, - 250 à - 65 Ma, D = 185 Ma |

CRÉTACÉ : de 4,355 à 4,435 Ga, - 145 à - 65 Ma, Durée = 80 Ma |
Le Crétacé est une période géologique qui s'étend de 145,5 ± 4 à 65,5 ± 0,3 Ma. Elle se termine avec la disparition des dinosaures et de nombreuses autres formes de vie. Sa fin est marquée par un stratotype riche en iridium que l'on pense associé à l'impact d'une météorite dans le Yucatan.
SUBDIVISIONS
Le Crétacé est généralement divisé en deux époques appelées Crétacé inférieur et supérieur.
Crétacé Inférieur (145,5 ± 4,0 - 99,6 ± 0,9 Ma, D = 46 Ma)
- Berriasien (145,5 ± 4,0 - 140,2 ± 3,0 Ma, D = 5,3 Ma)
- Valanginien (140,2 ± 3,0 - 136,4 ± 2,0 Ma, D = 3,8 Ma)
- Hauterivien (136,4 ± 2,0 - 130 ± 1,5 Ma, D = 6,4 Ma)
- Barremien (130 ± 1,5 - 125 ± 1,0 Ma, D = 5 Ma)
- Aptien (125 ± 1,0 - 112 ± 1,0 Ma, D = 13 Ma)
- Albien (112 ± 1,0 - 99,6 ± 0,9 Ma, D = 12,4 Ma)
Crétacé Supérieur (99,6 ± 0,9 Ma - 65,5 ± 0,3 Ma, D = 34 Ma)
- Cénomanien (99,6 ± 0,9 - 93,5 ± 0,8 Ma, D = 6,1 Ma)
- Turonien (93,5 ± 0,8 - 89,3 ± 1,0 Ma, D = 4,2 Ma)
- Coniacien (89,3 ± 1,0 - 85,8 ± 0,7 Ma, D = 3,5 Ma)
- Santonien (85,8 ± 0,7 - 83,5 ± 0,7 Ma, D = 2,3 Ma)
- Campanien (83,5 ± 0,7 - 70,6 ± 0,6 Ma, D = 13 Ma)
- Maastrichtien (70,6 ± 0,6 - 65,5 ± 0,3 Ma, D = 5 Ma)
Wikipédia > Septembre > 2010 |
|
Crétacé Supérieur (± 4,4 GA, 99,6 ± 0,9 Ma - 65,5 ± 0,3 Ma, D = 34 Ma) |
À l'Ombre des Plantes à Fleurs |
Le Crétacé est né dans le calme. Les continents se séparent en douceur. Dans ce climat favorable, l'évolution donne libre cours à son inventivité. La palme en revient aux végétaux : aucune trouvaille n'aura, autant que les fleurs, transformé les écosystèmes terrestres.
Autant le Crétacé s'est achevé brutalement, autant il est né en douceur. Aucune catastrophe géologique, aucun bouleversement climatique majeur ne marque son avènement, il y a 145 millions d'années. Les lents mouvements tectoniques amorcés pendant la période précédente, le Jurassique - à savoir la séparation progressive de la Pangée ancien supercontinent mondial, en deux grands blocs : Laurasie au nord, Gondwana au sud - se poursuivent en douceur. Lentement, le Gondwana se fragmente en une dizaine de petits continents (dislocation qui s'achèvera de manière fracassante avec l'intrusion de l'Inde dans l'Asie). Le climat non plus ne subit pas de variation notable. Il reste plutôt chaud, comme au Jurassique, et les pôles sont libres de glace.
Bien sûr, la lente séparation des continents a des conséquences non négligeables sur le climat comme sur la vie marine et terrestre. Des courants marins régionaux apparaissent, amplifiant les contrastes saisonniers aux latitudes moyennes et élevées. Avec la dislocation des terres, le niveau de la mer augmente progressivement, jusqu'à des valeurs jamais atteintes depuis. Lentement submergées, de vastes plaines se transforment ainsi en mers tièdes et peu profondes. S'y développent d'innombrables organismes marins (principalement de minuscules algues chrysophycées et des protistes foraminifères) fabriquant des coquilles calcaires ou siliceuses. Après la mort de ces organismes, leurs squelettes, sédimentant sur le fond, formeront ces énormes couches de craie typiques du Crétacé (creta signifie craie en latin), qui donneront entre autres les grandes falaises de Normandie. Ailleurs, dans les lagunes et les marais côtiers mal oxygénés, les innombrables débris d'algues microscopiques donneront les réserves de pétrole exploitées aujourd'hui par l'homme.
Dans ce calme relatif, les organismes marins et terrestres vont évoluer "en paix". Epargnés par les catastrophes géologiques, ils peuvent lutter entre eux "à la loyale", sous la pression de la sélection naturelle. De nombreux groupes se diversifient, parvenant à prendre le pas sur leurs concurrents moins bien adaptés. En mer, aux côtés de reptiles marins (plésiosaures, ichthyosaures, mosasaures) et d'une pléiade d'ammonites et de bélemnites (cousines disparues des pieuvres) commence à s'imposer une faune d'allure très actuelle : poissons osseux modernes (téléostéens), requins et raies modernes (néosélaciens), crabes et homards, buccins et cônes... Sur terre, les dinosaures, maîtres incontestés du Jurassique, continuent de se diversifier. Tout comme, à l'interface terre-mer, leurs cousins ptérosaures.
Un air de famille : Côtoyant les grands reptiles marins, de nouvelles formes de poissons "modernes" apparaissent, comme cette raie (Heliobatis) trouvée au Liban. ->
L'époque est aussi riche en nouvelles inventions. L'une des plus ingénieuses, et peut-être la plus lourde de conséquences, est l'œuvre non pas d'animaux, mais de végétaux : c'est l'invention des graines fermées et des fleurs modernes par les angiospermes, ou "plantes à fleurs". Dotées de ces précieux organes, les plantes à fleurs colonisent vite tous les milieux terrestres. Revêtant des aspects chaque fois plus variés, se perfectionnant sans cesse, elles finiront par supplanter la plupart des espèces concurrentes. En quelques dizaines de millions d'années, leur progression transformera l'ensemble des paysages, influençant largement l'évolution de la vie sur terre.
 Extinction de masse
Les ammonites ->, très abondantes durant le Crétacé, disparaîtront brutalement à la fin de de cette période, en même temps que de nombreuses autres espèces marines et terrestres.
Mer de craie
Il y a 80 Ma, les plaines se transforment en mers tièdes et peu profondes. Les organismes au squelette carbonaté (des coccolithes ->) qui s'y accumulent, donneront, en sédimentant, la craie.
UNE INVENTION RÉVOLUTIONNAIRE
Comment ont été inventées les fleurs ? Pour le comprendre, il faut effectuer un retour en arrière, jusqu'au milieu de l'ère primaire. Plus précisément au Dévonien, il y a environ 380 millions d'années. C'est à çette lointaine époque que sont apparues les premières plantes à graines. Les plantes à fleurs, ou angiospermes, sont les dernières nées de leur lignée.
Dès leur apparition, les plantes à graines ont eu un énorme succès ecologique. Portant leurs graines nues sur des écailles, les premières d'entre elles, dites fougères à graines, ressemblaient aux lycopodes. Puis vinrent les Gymnospermes, tels les ginkgos et les conifères. Mieux équipés pour survivre et se reproduire que les plantes à spores - vraies fougères, prêles et apparentées - abondantes jusque-là, les nouvelles venues ont supplanté leurs concurrentes "dépassées" dès le Trias, et dominé les terres tout au long du Jurassique.
Cependant, les ovules et les graines "nus" des ginkgos et des conifères ne sont guère protégés par les écailles. De ce fait, ils sont vulnérables aux champignons, aux insectes, à la sécheresse ou aux agressions chimiques.
C'est de ce point faible que parviennent à triompher, vers la fin du Jurassique, les premières plantes à fleurs. Profondément enfouis dans les ovaires, puis dans les téguments protecteurs de la graine, leurs ovules et leurs embryons sont à l'abri des agressions chimiques et biologiques. C'est pourquoi ces plantes se sont vite imposées face à leurs concurrentes. Sous la pression de la sélection naturelle, elles ne cessent de perfectionner leur système de reproduction. Progressivement, leurs graines deviennent des championnes de la résistance et de la longévité. Chacun le sait : le gland d'un chêne peut patienter plusieurs dizaines d'années dans un sol défavorable avant de germer...
Autre innovation, les enveloppes protectrices de la graine sont vite mises au service de sa dispersion. Certaines espèces équipent leurs semences d'ailettes ou de poils, qui favorisent leur transport par le vent. D'autres les empaquettent dans une seconde enveloppe nutritive et odorante, riche en sucres, qui sert d'appît pour les petits vertébrés : après avoir mangé la pulpe du fruit ou de la baie, ceux-ci se débarrassent à quelque distance de la graine indigeste. En inventant les fruits, ces plantes ont ainsi fait naître un nouveau mode d'alimentation : celui des animaux frugivores !
Mobilité et résistance des graines : voici deux grands atouts pour coloniser des sites très distants, pour s'imposer dans toutes sortes de milieux terrestres... Mais les angiospermes font encore mieux : les fleurs. Se contentant des services du vent, certaines - comme les graminées - dotent simplement leurs stigmates de longs poils, dans lesquels s'accrochent les grains de pollen transportés par le vent. D'autres jouent une tout autre carte, beaucoup plus complexe mais très efficace : celle de la pollinisation par les insectes.
DE LA GRAINE À LA FLEUR |
C'est à la fin de l'ère primaire, au Carbonifère et au Permien, que s'imposent les plantes à graines (ou "spermaphytes"). Par rapport aux autres végétaux, elles innovent par leur cycle de reproduction simplifié, analogue à celui des animaux, et manifestement plus efficace. Les plantes "primitives", comme les fougères passent par deux générations obligatoires d'individus : le sporophyte (qui porte les spores) et le gamétophyte (qui porte les gamètes). Les plantes à graines, elles, se reproduisent en une seule génération. Elles produisent à l'îge adulte des cellules sexuelles mîles (transportées dans les grains de pollen) ou femelles (regroupées dans un ovule). Ces cellules fusionnent deux à deux pour donner un embryon renfermé dans une graine, prête à germer dans le sol pour donner une nouvelle plante.
Dans un premier temps, les ovules - et donc les graines - sont nus : d'où le nom de gymnosperme (du grec gumnos, "nu", et sperma, "semence") donné à ces plantes. Chez les formes "primitives" comme les cycadales et les gingkos, la fécondation est encore très hasardeuse. Transportés par le vent les grains de pollen tombent parfois, par hasard près d'un ovule porté par un cône femelle de la bonne espece. Les anthérozoïdes libérés doivent ensuite nager vers l'ovule pour le féconder. C'est au Jurassique supérieur que sont apparues les gymnospermes "évoluées", comprenant les conifères et leurs apparentés. Avantage adaptatif : leurs grains de pollen produisent un tube pollinique qui apporte directement le gamète mîle à l'ovule. Chez les plantes à fleurs ou angiospermes (du grec aggeion "récipient, enveloppe"), les ovules sont enfermés dans une tunique protectrice, l'ovaire. Celle-ci est ouverte sur l'extérieur par un mince conduit gluant, le stigmate (aussi appelé pistil), auquel se collent ou s'accrochent les grains de pollen voyageurs. Au moyen de signaux chimiques spécifiques, le stigmate accueille et oriente les tubes polliniques de la même espèce jusqu'aux ovules : ceux-ci libèrent alors leurs gamètes mîles, et la fécondation peut avoir lieu. Progressivement, les angiospermes ont perfectionné le système et lui ont adjoint de nouvelles fonctions. Ainsi, la présence de tissus protecteurs a favorisé l'évolution de traits physiologiques augmentant la longévité des embryons : mise en place de réserves alimentaires (albumen), diminution des echanges respiratoires, resistance à la deshydratation, etc. |
PLANTES ET INSECTES : DES DESTINS NOUÉS
Nés au Dévonien, les insectes étaient déjà très diversifiés au Jurassique. Ils comptaient une majorité d'espèces se nourrissant de plantes ou les parasitant : sauterelles, punaises, pucerons, coléoptères, guêpes, etc. Avec l'expansion des plantes à graines certains de ces insectes - coléoptères, mouches, papillons et guêpes primitifs - se sont spécialisés dans la consommation du pollen, une denrée calorique très riche en protéines. Voletant d'une plante mîle à l'autre, à la recherche de nourriture, ils se sont mis à transporter sur leur corps et également sur leurs pattes, à leur insu, des grains de pollen.
Les plantes à fleurs ont vite su exploiter les services de ces insectes amateurs de pollen. Se dotant de pétales colorés invisibles de loin, de parfums bien reconnaissables, mais aussi de fleurs mîles et femelles très semblables ou hermaphrodites, elles se sont signalées à l'attention de ces insectes et leur ont "offert" généreusement du pollen et du nectar. En retour, ces derniers ont concentré sur les fleurs nourricières et démonstratives leur système sensoriel de recherche. C'est la naissance d'une longue et fructueuse collaboration...
Le succès à long terme a sa rançon : avec la diversification des angiospermes naît la compétition entre les espèces pour se reproduire, néfaste à chacune d'elles. C'est probablement en décalant leurs périodes de floraison, comme elles le font encore aujourd'hui, que les premières plantes à fleurs amatrices d'insectes (dites "entomophiles") réduisent cette compétition. Elles peuvent aussi jouer sur les horaires d'ouverture de leurs pétales au cours de la journée, diversifier leurs formes, leurs couleurs, leurs odeurs... Pour augmenter encore le succès de fécondation, chaque espèce limite l'accès de son pollen et de son nectar à un petit nombre d'espèces d'insectes, ses pollissisateurs "officiels", en modelant sur eux la forme de sa corolle. En réponse, pour bénéficier de la générosité des plantes, les insectes doivent continuellement ajuster leur anatomie à celles des fleurs qu'ils butinent.
Cette collaboration étroite et ingénieuse sera bien sûr très bénéfique aux deux parties. Sous son effet, les plantes à fleurs se multiplient et se diversifient davantage encore. À tel point qu'à la fin du Crétacé, elles comptent sans doute plusieurs dizaines de milliers d'espèces. Dans l'ombre, les conifères et autres gymnospermes se réduisent comme peau de chagrin - on compte aujourd'hui près de 300.000 espèces de plantes à fleurs, contre seulement 300 autres plantes à graines (essentiellement des conifères).
De leur côté, deux lignées de papillons et de guêpes se détachent du lot, vers le milieu du Crétacé. Les premiers ont troqué les mandibules broyeuses de pollen de leurs ancêtres contre une trompe récoltant le nectar, trompe dont la longueur s'est accrue en réponse à celle des corolles des fleurs visitées. Ces papillons modernes comptent aujourd'hui plus de 200.000 espèces. Les guêpes se dotent, quant à elles, d'une langue pour saisir le nectar, de poils raides sur les pattes arrière en guise de "filets à pollen", ainsi que d'une bonne mémoire à court terme des formes, des couleurs et des odeurs. Leurs descendantes actuelles guêpes, abeilles et fourmis (dont beaucoup ont élargi ou modifié leur régime alimentaire), comptent elles aussi plus de 200.000 espèces.
Rude concurrence
Les conifères (ici un cône fossile d'Araucaria, Jurassique), plantes à graines nues, cèdent
petit à petit la place aux plantes à fleurs, dont le mode de reproduction est plus efficace.
QUELQUES RÉPERCUSSIONS SUR LA FAUNE TERRESTRE
Bien sûr, la double explosion des plantes à fleurs et des insectes pollinisateurs a retenti sur les autres animaux terrestres. Elle s'est accompagnée - s'agit-il d'une relation de cause à effet ? - de l'apparition et de la diversification de trois groupes de dinosaures herbivores : les hadrosaures, les ankylosaures et les cératopsiens. Se nourrissant de "paléoherbes" et d'autres plantes à croissance et reproduction rapides dans des milieux ouverts, ces nouveaux dinosaures prospèrent jusque vers la fin du Crétacé. À quelque distance dans les forêts, tout comme au Jurassique, d'immenses sauropodes au long cou se délectent des feuilles et des branches des arbres.
Le terrain est également propice à l'évolution d'animaux granivores, frugivores et insectivores. Rares au Jurassique, les lézards mangeurs d'insectes se multiplient. Apparus à la jonction Jurassique-Crétacé, les premiers oiseaux se nourrissent eux aussi probablement d'insectes et de petits vertébrés ; par la suite en se diversifiant, certains deviendront granivores ou frugivores, d'autres piscivores... Clairement, les oiseaux du Crétacé bénéficient de la double explosion des angiospermes et des insectes, comme leurs descendants en profitent encore aujourd'hui.
Qu'en est-il des mammifères ? Depuis le Jurassique superieur, certains sont equipés de molaires à la fois tranchantes et broyeuses très efficaces pour tailler et réduire en bouillie les denrées dures... comme les graines et la carapace des insectes. Vigilants et agiles, nocturnes pour la plupart, ces petits mammifères exploitent eux aussi la manne apportée par les plantes à fleurs, leurs graines, leurs fruits et leurs pollinisateurs.
En quelques dizaines de millions d'années, le développement des plantes à fleurs a ainsi complètement transformé les écosystèmes terrestres. Les forêts de conifères, de cycadales et de ginkgos, les tapis de fougères à graines, se sont changés en forêts de feuillus et en milieux boissonneux d'allure plus moderne, parsemés de fleurs aux vives couleurs, de baies et de fruits parfumés, et habitées par des myriades d'insectes pollinisateurs. S'ajoutant aux grands dinosaures mangeurs de branches d'arbres assez semblables à ceux du Jurassique, de nouveaux dinosaures herbivores se nourrissent de plantes basses dans des milieux plus secs. Et derière leur passage, discrètement, des lézards, des oiseaux et de petits mammifères mangeurs d'insectes de graines ou de fruits nutritifs s'activent le jour ou la nuit. Ils prendront bientôt le devant de la scène.
De petits opportunistes : (Lézard mexicain du Crétacé.) L'apparition des plantes à fleurs favorise l'évolution d'animaux granivores, frugivores, insectivores. Rares au Jurassique, les lézards mangeurs d'insectes prolifèrent.
ANNE TEYSSÈDRE - SCIENCE & VIE Hors Série > Décembre > 2000 |
|
|